Extraits du livre VIII de "De re rustica" de Columelle
De la conservation des oeufs.
La conservation des oeufs pendant un long espace de temps n'est pas, non plus, étrangère à nos soins. On les conservera très bien durant l'hiver, en les recouvrant de balles de céréales, et, durant l'été, en les enfonçant dans du son. Avant de les placer ainsi, quelques personnes les couvrent, pendant six heures, de sel égrugé, puis les essuient et les enfouissent dans les balles ou dans le son; d'autres entassent dessus des fèves entières, et un plus grand nombre des fèves moulues; d'autres les recouvrent de sel en grain; d'autres enfin les font durcir dans de la saumure chaude.
Mais si l'emploi du sel empêche les oeufs de se gâter, il a l'inconvénient de les casser et de ne pas les conserver pleins : ce qui éloigne l'acheteur. Ceux même qui ne font que les plonger dans la saumure, ne parviennent pas même à les garder dans leur intégrité.
De l'engraissement des poules.
Quoique l'engraissement des poules soit plutôt l'affaire de l'engraisseur que celle du fermier, cependant, comme c'est une chose facile, j'ai cru devoir dire ici comment il faut opérer. Pour obtenir de bons résultats, il est surtout important d'avoir un emplacement chaud, peu éclairé, et dans lequel chaque volaille soit tenue renfermée, soit dans une petite cage, soit dans un panier suspendu, où elle est tellement resserrée qu'elle ne peut se retourner.
Les poules y trouveront toutefois une ouverture à chaque bout, de manière qu'elles puissent passer la tête par l'une d'elles, et la queue ainsi que le derrière par l'autre, afin de pouvoir prendre leur nourriture, et rendre leurs excréments sans en être salies. On leur fait une litière de paille très propre ou de foin très moelleux, c'est-à-dire de regain : car, si elles sont couchées durement, elles ont de la peine à s'engraisser. Il faut leur arracher toutes les plumes de la tête, du derrière et du dessous des ailes : les premières pour qu'il ne s'y engendre pas de poux, les dernières de peur que les excréments en s'y attachant n'y fassent naître des ulcères.
Leur nourriture consiste en farine d'orge pétrie dans de l'eau, dont on fait des boulettes, qui servent à les engraisser. Les premiers jours, la ration sera peu considérable, afin qu'elles puissent s'accoutumer à en digérer une plus forte : car il faut surtout prévenir les indigestions, et ne donner que ce qui peut être élaboré par leur estomac, et seulement lorsqu'on se sera assuré, en leur tâtant le jabot, qu'il n'y reste rien du repas précédent.
Ensuite, quand l'oiseau est rassasié, on descend sa cage pour le laisser un peu sortir, non pour qu'il courre au dehors, mais pour qu'il puisse s'éplucher avec son bec et se débarrasser des insectes qui le piquent ou le mordent.
Telle est à peu près la méthode commune aux engraisseurs. Quant aux personnes qui veulent non seulement engraisser leurs volailles, mais encore les vendre tendres, elles détrempent la farine d'orge, dont nous avons parlé, avec de l'eau fraîchement miellée, et les gorgent avec ces substances. Il y a des gens qui engraissent leurs poules en leur donnant du pain de froment détrempé dans un mélange de trois parties d'eau et d'une partie de bon vin. Soumises au régime le premier jour de la lune (ce qu'il faut aussi observer), elles seront parfaitement grasses vingt jours après.
Si elles viennent à prendre en dégoût cette nourriture, il faudra en diminuer la ration pendant autant de jours qu'il s'en sera écoulé depuis qu'elles sont en mue; de manière toutefois que la durée de l'engraissement ne dépasse pas le vingt-cinquième jour de la lune. Il est, du reste, de principe que les plus fortes volailles doivent être destinées aux tables somptueuses : par ce moyen, le prix qu'on en retirera sera en rapport avec la peine et la dépense qu'elles auront occasionnées.
Ces pages ont été extraites du livre VIII de DE RE RUSTICA de Columelle, toutefois, le livre VIII traite également des sujets suivants:
De l'éducation des ramiers et des pigeons, et de la construction des colombiers.
De la nourriture des tourterelles.
De l'éducation des grives.
De l'éducation des paons.
De l'éducation des poules de Numidie et des poules sauvages.
Des oiseaux que les Grecs nomment amphibies et les Latins oiseaux de double vie.
De l'éducation des oies et de la formation des oisonneries.
Des canards, des sarcelles et autres oiseaux semblables.
Des piscines et de la nourriture des poissons.
De la position du vivier.